[Depuis que l’on a retiré cette histoire du livre, deux vagues d’at­ten­tats sont passées par là et les dicta­teurs du “n’en parle pas sinon nous te trai­te­rons de raciste” se terrent dans leur abri.]

Le rempla­ce­ment des cours philo­so­phiques (reli­gions, morale) par un seul et unique cours de philo­so­phie et/ou d’his­toire des phéno­mènes reli­gieux serait de nature à plon­ger le public scolaire dans une vraie mixité cultu­relle.
Syndi­cat Appel

L’ins­ti­tu­trice que je remplace ne semble pas aller mieux. Il ne me reste déjà plus que deux semaines avant le prochain bulle­tin. Depuis neuf semaines qu’ils ont cours avec moi, ils ont été ense­ve­lis sous les maths, la conju­gai­son et l’or­tho­graphe. Il est grand temps de diver­si­fier. Alors, en route pour un peu d’his­toire.
Ils ont déjà vu la Première Guerre mondiale : nous sommes plon­gés dans l’an­née du cente­naire et je n’ai pas envie de leur infli­ger en plus l’étude de la Deuxième. À ce niveau, le programme n’est abso­lu­ment pas direc­tif quant à la matière à abor­der alors, tant qu’à faire, lais­sons les élèves déci­der.

J’énu­mère quelques propo­si­tions qui résument à mon avis l’his­toire de la construc­tion euro­péenne. Ils hésitent entre la Rome antique et la Révo­lu­tion française. C’est l’ère des déca­pi­ta­tions qui l’em­porte sur les combats de gladia­teurs. Je me dis au passage que cela ne peut pas leur faire de mal de comprendre qu’a­vant la révo­lu­tion indus­trielle et l’in­ven­tion du trac­teur, le peuple devait se saigner aux champs entre deux guerres et deux pandé­mies. Je leur demande alors comment, au cours de l’his­toire, on a tenté de rendre cette vie misé­rable plus inté­res­sante, plus accep­table. Ils proposent tous beau­coup de réponses mais sont sacré­ment surpris par la mienne : on a inventé le para­dis ! Pas facile de leur faire comprendre à quel point le clergé était une compo­sante essen­tielle de l’époque et comment il était lié au pouvoir.
— Qui déci­dait que le roi était le roi ?
— Les gens, via les élec­tions, propose un élève.
— Non, il n’y avait pas d’élec­tions. On était roi de père en fils. Mais qui a décidé que le premier roi était le roi ?
— C’était le plus fort, essaie un autre élève.
— Non. Comment un seul homme peut-il être plus fort que des milliers de paysans ?
Ils sont fina­le­ment surpris de ma réponse simpli­fiée : c’est Dieu qui désigne le roi (via le pape). Alors, pourquoi en vouloir au roi au point de lui couper la tête ?
Je suppose que ce type de phrase est inter­dit, mais j’es­père bien avoir semé le doute parmi mes fidèles élèves.

Si ton Seigneur l’avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient cru. Est-ce à toi de contraindre les gens à deve­nir croyants ?
Le Coran