Beaucoup d’enseignants voient les points et les bulletins comme le dernier moyen de pression qu’ils ont pour forcer les élèves réfractaires au travail. Retirer cela aux enseignants est très difficile et je les comprends.
Pour moi, retirer le système de bulletins actuels nécessite de repenser le cœur du fonctionnement de l’école. Cela demande quasiment aux enseignants de repenser leur métier. C’est très difficile. Je le vois tous les jours chez Learn to Be, l’association que je coordonne et qui accompagne beaucoup d’enseignants dans le changement.
L’exemple des jeux vidéo illustre cela très bien.
Une école trie les élèves par âge, et on essaie que tous les élèves de 10 ans apprennent la même chose en même temps. Par exemple, en février, ils apprennent tous à réduire une fraction. C’est le train du programme. Les bulletins actuels sont censés mesurer si tous ces enfants de 10 ans suivent bien le train du programme. Je trouve tout cela très artificiel.
Imaginez qu’on n’enseigne plus les fractions, mais les jeux vidéo. Comment allez-vous mesurer les progrès ? Allez-vous imposer que la première semaine, tous les enfants de 10 ans fassent le niveau 1 et surtout pas le niveau 2. Et si à la fin de la semaine, un enfant n’a pas réussi le niveau 1, vous allez le punir avec du rouge dans un bulletin ?
J’espère que non. Le bon sens voudrait que vous les encouragiez à progresser chacun à leur vitesse… Mais vous devez mesurer la progression !
Dans cet exemple, on voit bien que supprimer les bulletins n’a pas beaucoup de sens, ce serait un peu comme supprimer le sentiment de progression dans un jeu vidéo. À l’opposé, utiliser les bulletins pour forcer d’avancer à la même vitesse que le train fantôme du programme, cela n’a pas plus de sens. Je préfère mesurer qu’en math, l’élève était au niveau 83 et qu’en un mois il est passé au niveau 85.
Dans ma classe de primaire, par exemple, le bulletin c’était un grand tableau où chaque enfant ajoutait tous les jours des gommettes pour marquer sa progression.
« Si les élèves trichent, c’est parce que le système scolaire met plus en valeur le fait de réussir que le fait d’apprendre des choses. » Neil Tyson.