Je pensais que ce site offrait juste une cyber-armoire pour que plus d’enseignants partagent enfin leurs préparations. Quitte à vivre dans un pays où on se trouve mille raisons de réinventer la roue, autant regagner un peu de temps en organisant un marché gratuit de pièces détachées. Au fil des rencontres, Internet m’a montré mon erreur de jugement. Ce n’est pas cela le cœur de l’activité d’enseignons.be. Je ne m’en suis vraiment rendu compte que lorsque je me suis intéressé à Facebook en 2014. C’est alors que j’ai vu les posts défiler. Tous les jours. Une image, un court texte et un lien, souvent vers un article d’une ou deux pages sur leur site. Le plus étonnant, c’est la qualité associée à cette quantité : articles d’actualité, coups d’humeur, concours, etc. Contrairement à enseignons.be, la plupart des autres associations qui gravitent autour de l’enseignement postent quasi invariablement la même chose : des annonces. « Demain, nous organisons ceci, inscrivez-vous. Après-demain, nous serons là, rejoignez-nous ». La page Facebook de ces associations est alors un agenda qui fédère moins de 2000 fans, c’est-à-dire des personnes qui ont demandé à recevoir leurs publications. Je pose alors la question à Jonathan Fischbach, pilier d’enseignons.be.
— Comment faites-vous pour publier 15 articles de fond par mois et ce torrent de posts Facebook ? Vous devez être une flopée de contributeurs.
— Non, la toute grande majorité des publications vient de moi seul. Sauf pour les illustrations, là j’ai épuisé six dessinateurs.
— En plus de ton mi-temps de prof et du service de remédiations que tu mets en place ?
Là dessus, une maman au téléphone interrompt la conversation. Il comprend tout de suite ce qu’elle veut tandis qu’il ouvre un registre d’inscription. À la page 12, il reste une malheureuse petite place. Il y note le nom de l’élève de 4e professionnel qui semble avoir besoin d’un coup de pouce en bio, le mercredi après-midi. Il me dit que depuis la rentrée du congé de Toussaint, cela n’arrête pas. Il en parle avec la satisfaction d’un entrepreneur, mais je vois bien qu’il est épuisé et avec le tarif qu’il demande, cela couvre à peine ses frais. Il n’a aucun subside et à lui tout seul, sur son « temps de loisir », il a mis plus de choses en place que certaines équipes lourdement subventionnées. Comment fait-il ?
— Combien de temps te prennent tes publications en ligne ?
— Il faut compter deux heures par article en moyenne, fois 15 articles par mois.
— Et pour les posts et les discussions Facebook ? Ça doit prendre un temps fou d’arriver à 40 000 fans.
— Trente minutes par jour.
Pendant que nous discutions sur fond de musique rock, dans ce café sur la grand-place de Huy, un artiste s’approche et propose une caricature de l’un d’entre nous. Après avoir refusé, je le rattrape in extremis et lui propose plutôt d’immortaliser la scène.
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